Le Lanceur

Anticor menace de porter en justice le projet Lyon-Turin

L’association de lutte contre la corruption et pour l’éthique en politique pourrait déposer un dossier au pôle financier de Paris si le projet de ligne ferroviaire Lyon-Turin n’est pas “entièrement remis à plat”.

“Nous ne pouvions pas rester inactifs et indifférents à ce dossier qui est le plus important projet économique européen.” Anticor s’est penché sur la construction de la ligne ferroviaire Lyon-Turin. Plusieurs mois de travail qui ont abouti au vote, en assemblée générale de l’association, le 18 septembre 2016, du “principe d’ester en justice dans le dossier dit ‘Lyon-Turin'”.

Aucune plainte n’a, pour le moment, été déposée. L’association tient à rappeler son souhait de favoriser une “remise à plat” du projet Lyon-Turin avant de se résoudre à une action en justice, qui n’est, selon eux, “qu’une extrémité s’il n’est pas possible de se faire entendre”, comme ils l’ont rappelé ce jeudi dans une conférence de presse tenue à Lyon.

Ayant travaillé avec Daniel Ibanez, lanceur d’alerte qui lutte contre ce projet depuis plusieurs années, Anticor a repris les éléments contestés, comme son coût pharaonique, aujourd’hui estimé à plus de 30 milliards d’euros par l’association, ce qui en fait le plus gros projet européen actuel.

“La Cour des comptes a produit, en quatre années, pas moins de cinq rapports où cette dernière estime que le modèle économique du Lyon-Turin est totalement insoutenable”, rappelle notamment Anticor.

Le dernier en date, celui sur l’Agence de financement des infrastructures de transport, fin août, qui appelait à prioriser les projets comme le Lyon-Turin ou le canal Seine-Nord, des projets “largement hors de portée budgétaire de l’agence”, notaient les Sages. Une mise en garde balayée par Manuel Valls, avant que le ministre des Transports ne laisse entendre qu’une hausse de la taxe sur les carburants pourrait venir voler au secours de l’AFITF.

Guillaume Pépy aussi s’est inquiété de ce projet et du fait que “ce sera autant d’argent en moins pour moderniser le réseau ferroviaire existant”. Anticor note ainsi que l’Etat reste sourd aux alertes et au “rejet de l’ensemble des grands corps, notamment financiers, de l’Etat”.

10 milliards d’euros à la charge des collectivités

Autre inquiétude, le financement. Le site internet de la Transalpine, qui porte le projet de ligne ferroviaire, évoque un financement de 30 % venant des collectivités locales, soit 10 milliards. “À moins de considérablement augmenter les impôts de la région, on voit mal comment les collectivités pourront participer sur un volet aussi important du financement”, s’interroge l’association.

Surtout que le réseau actuel n’est pas saturé car “les flux se sont stabilisés et que, sur la zone des Alpes du nord, les activités sont en diminution” et que “le concessionnaire sera à terme en quasi-faillite tant le trafic ne sera pas au rendez-vous”.

Dénonçant enfin l’absence d’expertise indépendante sur le projet, Anticor appelle donc les autorités à “prendre la mesure de la nécessité de remettre à plat ce projet pour le faire revenir sur une perspective soutenable, tant pour les finances publiques qu’en matière de prise en compte des avis des grands corps de l’Etat”. L’association se dit prête à revenir sur sa décision d’aller en justice si le projet évolue dans le bon sens.

Une charte éthique pour la présidentielle

Anticor a également profité de cette conférence de presse pour présenter sa charte éthique en vue de la présidentielle de 2017. Les sujets y sont sensiblement les mêmes que pour les autres campagnes (réserve parlementaire, non-cumul des mandats, lobbies…) La seule différence est que l’association a choisi, cette année, de se tourner vers les citoyens plutôt que les élus : “Nous souhaitons que les citoyens puissent hacker le système politique français et interpeller leurs candidats”.

Enfin, Anticor a dressé une liste de sujets sur lesquels ils ont été alertés par des lanceurs d’alerte locaux, sujets qu’ils ont brièvement présentés lors de la conférence de presse mais sur lesquels ils continuent, pour la plupart, de travailler, rappelant que “Anticor est une organisation horizontale” et que “chaque dossier, grand ou petit, mérite la même considération”.

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