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Jean-Michel Baylet s’emporte face aux accusations d’emploi fictif

Jean-Michel Baylet lors du meeting de François Hollande à Carmaux en 2012

Le ministre de l’Aménagement du territoire ferait travailler de manière irrégulière un de ses proches collaborateurs dans son fief de Valence-d’Agen, dans le Tarn-et-Garonne. Seuls deux journalistes locaux de France 3 ont osé mettre en cause le puissant baron, patron du Midi-Libre, se voyant qualifier en retour de “presse de caniveau”.

Innovation dans le monde des emplois fictifs en politique. Plutôt que de payer des proches sans justification, Jean-Michel Baylet ferait travailler un collaborateur de façon réelle mais sans statut officiel. L’inverse d’un emploi fictif, un emploi fantôme en quelque sorte, à en croire les révélations de France 3 Occitanie. Vieil ami du ministre de l’Aménagement du territoire, Max Courregelongue est très actif au sein du Pôle d’équilibre territorial et rural (PETR) Garonne-Quercy-Gascogne, une importante structure intercommunale dirigée par Jean-Michel Baylet lui-même. Problème, il n’a aucune fonction officielle. Max Courregelongue leur a pourtant assuré être rémunéré pour son action au sein du PETR.

Cet ancien rugbyman, investi dans le club de Valence-d’Agen, est bien connu dans la région, notamment comme un très proche de Jean-Michel Baylet. Il fut son directeur général des services (DGS) une partie des trente années passées par le ministre à la tête du conseil général du Tarn-et-Garonne. Les deux hommes ont été mis en cause ensemble dans une enquête sur des marchés relatifs à des frais de bouche dans le département, avant d’obtenir un non-lieu en 2011. Max Courregelongue a en revanche été condamné, la même année, pour délit de favoritisme dans le cadre d’un marché public relatif aux transports scolaires. Il a quitté la DGS du département fin juin 2015, pour prendre sa retraite.

Nombreux soupçons d’irrégularité

Un repos tout relatif. L’homme n’a en réalité jamais quitté les arcanes du pouvoir local. On le retrouve ainsi dès le 30 juillet assis derrière Jean-Michel Baylet à une réunion du PETR. Un organisme au sein duquel il travaille encore aujourd’hui, comme nous le confirme un agent par téléphone. Et, visiblement, Max Courregelongue ne se ménage pas. Très présent à Castelsarrasin, il a été remercié de son action par Jean-Michel Baylet lui-même dans un récent discours. Pourtant, les 71 printemps de Max Courregelongue auraient légalement dû l’empêcher de sortir de sa retraite. Selon le décret du 15 février 1988, les agents contractuels de la fonction publique territoriale ne peuvent en effet être recrutés après 65 ans.

Au PETR, Max Courregelongue n’est “pas là tous les jours”, “il n’a pas de titre officiel” non plus, nous apprend-on. L’ancien rugbyman est en fait rémunéré par la communauté de communes des Deux Rives, selon M. Baylet lui-même, une entité disctincte du PETR. Pour travailler pour une structure différente de celle qui le paye, un agent doit avoir une convention de mise à disposition. Faute de quoi l’emploi peut être considéré comme fictif par la justice et le salaire comme relevant du détournement de fonds. Or, aucune trace de mise à disposition n’a pu être retrouvée par les journalistes de France 3 Occitanie.

“Presse de caniveau”

Ces révélations sont loin de plaire à Jean-Michel Baylet, baron local habitué à placer ses pions et ses proches où bon lui semble. Max Courregelongue semble d’ailleurs être un “homme clé du système Baylet”, d’après l’ouvrage Les Barons – Ces élus qui osent tout, du journaliste Jean-Baptiste Forray. Une mainmise locale accentuée par un statut de cumulard hors pair, qui permet au baron, dans un mélange des genres et des rôles des plus étonnant, d’administrer son fief à sa main.

Le patron du Midi-Libre et de La Dépêche du Midi, les deux titres de presse quotidienne régionale références en Occitanie, n’a pas l’habitude de voir ses affaires exposées. Et il n’aime pas beaucoup cela. Interrogé par un élu quelques jours après les révélations des journalistes de France 3 Occitanie, le ministre a parlé d’une “presse de ragots et de caniveau qui n’a rien à voir avec la presse régionale”.

 

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