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L’“islamiste masqué” Mohamed Saou se dévoile

Photo de Mohamed Saou issue de son profil Facebook

Mohamed Saou, référent inconnu du mouvement En Marche dans le Val-d’Oise, qui est soupçonné d’être un sous-marin de l’islam politique, livre ses réponses sur les accusations formulées contre lui.

 

L’“affaire Saou” : rappel des faits

Accusé d’avoir partagé un post Facebook favorable à Erdogan lors du coup d’État manqué, un autre contre Manuel Valls dont il est sur les réseaux un opposant, un troisième à teneur conspirationniste et surtout un où il déclare ne pas être Charlie, donc d’avoir manifesté des opinions guère partagées par les progressistes et les laïcs, Mohamed Saou a été évincé de la campagne d’En Marche, qui s’en remet à sa commission d’éthique pour juger sur le fond. L’homme n’a pourtant pas vraiment le profil d’un dangereux islamiste.

Les réseaux sociaux à l’origine du trouble

C’est l’ancienne élue PS Céline Pina, traqueuse sans merci des islamistes masqués depuis environ un an, qui a déclenché les hostilités, le 5 avril. Elle affirme alors sur Facebook que Mohamed Saou serait un “fervent admirateur de Marwan Muhammad » (Marwan Muhammad est l’actuel directeur exécutif du CCIF, le Collectif contre l’islamophobie en France, association plus que controversée (1), coupable de n’être pas Charlie et, par voie de conséquence, de vomir la laïcité, de ne rien comprendre à la liberté d’expression, de nier le terrorisme, de se victimiser pour rien et, dans un texte aux accents douloureux paru le 10 avril sur le FigaroVox, d’être de ces personnes perméables aux théories du Parti des indigènes de la République (2), donc islamistes, pour le rétablissement du délit de blasphème, favorisant le communautarisme, antinationaux (préférant la Oumma musulmane à la France), sexistes, antisémites… et inaccessibles à l’heureuse émancipation laïque. Pas moins.

Immédiatement relayé par le site identitaire FDeSouche, friand de telles révélations, le post Facebook initial déclenche articles et réactions d’En Marche, dont un communiqué daté du 9 avril. Mais pas seulement.

Le CCIF s’invite dans la campagne

Flatté d’avoir été personnellement mis en valeur après sa prestation déplorable face à Lydia Guirous et Sonia Mabrouck, Marwan Muhammad saute sur l’occasion. S’adoubant interlocuteur légitime des présidentiables, il se fend d’un long courrier annonçant que le CCIF – dont il rappelle le poids numérique et médiatique dans l’espoir que chacun mesure sa puissance de feu – mettra en demeure tous les candidats de se prononcer sur la question de son cheval de bataille : le concept d’islamophobie (3).

Pour Céline Pina, l’entrée en campagne du CCIF est la preuve ultime de la duplicité de Mohamed Saou et de la complaisance d’En Marche. Elle se prononce le 10 avril : En Marche “choisit le CCIF et le vote communautariste contre la République et l’esprit Charlie”. Elle en voit des preuves partout.

Marocain d’origine, M. Saou avait en effet su convaincre dans les “quartiers” notamment, bien que l’origine ethnique de ses nouvelles recrues ne soit pas prouvée être spécialement “communautaire”. Mais, quand on chasse l’islamiste, on présuppose qu’il est “basané” et forcément issu “des quartiers”.

Tremblez, macronistes ! Sur Twitter, le 12 avril, c’est la guerre totale : la nébuleuse Pina et le Front national d’un côté ; le CCIF et la nébuleuse néo-antiraciste de l’autre ; tous tirent à boulets rouges sur Emmanuel Macron. Les Républicains suivent.

Nous armant d’un courage qui confine à la bravoure, nous avons soumis le diabolique Mohamed Saou à la question.

 

Mohamed Saou, un islamiste en “signal faible” ? Questions-réponses

Est-il proche du CCIF ? “Je ne suis ni adhérent, ni sympathisant, ni lié d’une quelconque manière au CCIF.”

Partage-t-il avec le CCIF et le PIR la volonté de faire abroger les lois de 2004 et 2010 (4) ? “Je respecte ces lois et je fais en sorte qu’elles soient respectées. Je suis un républicain, attaché aux valeurs de la République, notre socle : liberté, égalité, laïcité. Je suis pour la stricte application de la loi de 2004 et je suis le premier à la rappeler à mes élèves (5).”

Vomit-il la laïcité ? “Je suis attaché à la loi de 1905.”

Partage-t-il avec le CCIF et le PIR la défense du voile intégral ? “À titre personnel, je suis contre la burqa, le burkini… Mais j’ai un problème avec le fait d’interdire.”

Est-il favorable au délit de blasphème ? “Je suis pour la liberté d’expression.”

Charlie Hebdo et les caricatures ? “Charlie a le droit de tout caricaturer, absolument tout. Ils doivent pouvoir librement s’exprimer, et je me battrai pour qu’ils puissent continuer.”

Pourquoi avoir écrit “Je ne suis pas Charlie, je n’ai jamais été Charlie” ? “Je ne lis pas Charlie Hebdo. Je ne cautionne pas l’humour de ce journal. J’ai réagi émotionnellement, pas envie de rire des morts, des blessés… Mais si “être Charlie” signifie être pour la liberté d’expression, je suis Charlie.”

Prône-t-il “l’exaltation de l’appartenance à la Oumma” ? “Je me bats contre le communautarisme, je me fous de la religion de mes amis. Il n’y a pas de carte électorale de Français musulmans il y a une carte électorale de citoyens français.”

Flirte-t-il avec l’antisémitisme ? “Je n’ai nulle envie de me justifier en disant que j’ai des amis juifs et athées.”

Que pense-t-il de l’intervention du CCIF ? “Que mon affaire soit récupérée par le CCIF et les Identitaires, c’est inévitable.”

Mohamed n’a rien d’un fanatique”

Jean-Laurent Turbet, directeur de cabinet du maire de Goussainville chargé de la sécurité (6), s’emporte : “Je connais Mohamed depuis longtemps. Fils d’immigrés marocains, il est totalement issu de la méritocratie républicaine. Il ne m’a jamais parlé du CCIF. Il n’est pas Frère musulman, ce mec. Rien de tel dans ses attitudes, ses prises de parole, nos échanges depuis des mois, ne ressemble à cela. Il n’y a aucune ambiguïté. Il est allé à Auschwitz en 2009 avec le Mémorial de la Shoah. C’est un grand ami d’un membre éminent de la communauté juive de la région.”

Quid des posts Facebook laissant objectivement planer un doute, selon plusieurs militants connus de la laïcité, en off ? “Mohamed est musulman, croyant et pratiquant. Jusqu’à preuve du contraire, ce n’est pas interdit. Quand je lis ce qu’on écrit sur lui, j’ai l’impression qu’on parle de quelqu’un d’autre. D’autres élus de Goussainville partagent cet avis. Mohamed n’a rien d’un fanatique.”

  1. Voir notamment Islamophobie, la contre-enquête (éd. Plein Jour, 2014). Et, sur le site Islamophobie.org une série d’articles sur le CCIF. Également, sur le site du Figaro, une explication détaillée de ses méthodes.
  2. Pour les liens avec le CCIF, voir I. Kersimon, “Islamophobie : l’antiracisme infiltré par l’islam politique”, in L’Islamophobie (éd. Dialogue Nord-Sud, 2016). Cette mouvance profondément antirépublicaine analyse toute situation à l’aune d’une “lutte décoloniale”.
  3. Voir notamment le site Islamophobie.org et l’entretien de Pierre Cormary avec Isabelle Kersimon “Islamophobie : mythe ou réalité ?”
  4. Loi du 15 mars 2004 sur le port ostensible de signes religieux à l’école et loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public.
  5. Mohamed Saou est professeur d’histoire-géographie.
  6. Peu susceptible de complaisance avec l’islam politique ou d’amitiés avec un Alexis Bachelay.

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Que devient Mustapha Hamadi ?

Bruno Retailleau ou Éric Ciotti ont été beaucoup moins vindicatifs le mois dernier à l’encontre de l’élu LR de Chambéry, délégué à la sécurité, Mustapha Hamadi. Celui-ci avait notamment tonné contre “un conglomérat de lobiistes Sioniste” (sic) lors de la polémique sur l’affiche aux motifs antisémites diffusée par Les Républicains contre Emmanuel Macron.

Élus locaux et représentants de la Licra avaient demandé sa démission au maire de Chambéry, Michel Dantin, dont la réponse avait été tout aussi évasive que celle d’En Marche au sujet de M. Saou.

Après s’être excusé sur Facebook en déclarant avoir “fait une connerie”, M. Hamadi avait supprimé sa page.

Le site FdeSouche n’avait pas relayé l’affaire. M. Hamadi est toujours élu à Chambéry.

 

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