Le Lanceur

La Poste : les facteurs bientôt chauffeurs pour seniors ?

un véhicule de La Poste lors d'une tournée en campagne en 2008. AFP PHOTO MYCHELE DANIAU

Devant le déclin de l’activité courrier, la direction de La Poste cherche sans cesse à diversifier l’activité de ses facteurs. Dans le Rhône, une expérimentation va bientôt débuter et pourrait faire des postiers des chauffeurs pour seniors.

Distribuer le courrier, livrer les colis, installer la TNT… la liste des activités des facteurs s’allonge petit à petit. Et bientôt, une autre pourrait s’y ajouter : chauffeur pour personnes âgées en zone rurale. C’est en tout cas le nouveau service qui va être testé à Belleville (Rhône) et dans les 33 communes gérées par le bureau de poste. Selon un document qu’a pu se procurer Le Lanceur, La Poste souhaiterait développer ses “nouveaux services” et devenir “un acteur majeur de la silver économie au travers de la silver mobilité”.
Concrètement, pendant les horaires de leurs tournées, les employés de la Poste pourraient poser la casquette de facteur pour celle de chauffeur, le temps d’emmener des clients “en ville, chez le médecin ou dans un établissement socio-médical par exemple”, explique un cadre de La Poste. Mais dans cette activité, La Poste ne serait que prestataire de service pour Cityzen mobility, une société déjà implantée en Ile-de-France où elle fonctionne principalement avec des chauffeurs de taxi.

La prestation au milieu de la tournée

Dans la pratique, les clients réserveraient leur course la veille via la plate forme de Cityzen mobility qui la valide auprès de la Poste. Le facteur postier débute sa tournée. A l’heure dite, il s’en détourne et récupère la personne chez elle et la mène au point d’arrivée. Il prévient alors la plateforme Cityzen mobility par sms avant de reprendre ses activités de livraison de colis et de courrier.

“On parle ici de trajets courts. L’aller-retour doit pouvoir s’effectuer au maximum dans l’heure. Le transport de personne reste une activité annexe”, explique un cadre de La Poste qui rappelle qu’il ne s’agit pour l’instant que d’une expérimentation. D’après les documents internes que Le Lanceur a pu se procurer, seuls des facteurs volontaires y participeront. Mais déjà, le syndicat FO s’inquiète des responsabilités et de la formation que pourront recevoir ces nouveaux chauffeurs. “On parle ici de transporter des personnes âgées, ce qui induit une prise en charge de personnes sensibles”, soutient Marc Bertrand, responsable communication du syndicat pour La Poste. D’après les documents de La Poste, le transport ne concernerait que des personnes “autonomes”. Chacun des facteurs volontaires devrait recevoir deux demi journées de formation et une fiche “savoir-faire facteur” leur sera remise.

Pour FO, la mise en place d’un tel service pose des questions de gestion du personnel. Mais La Poste promet que “lors de la réalisation d’une prestation, l’activité du facteur volontaire sera allégée“. Selon un référent en ressources humaines de l’entreprise, qui a souhaité rester anonyme “les heures supplémentaires seront payées. Mais le but n’est pas de payer des heures sup’ à tous nos facteurs à tour de bras pour une activité qui n’est pas notre mission première. Là, la situation serait ubuesque. Si nous cherchons à développer les missions de ce type c’est justement parce que l’activité courrier est en diminution constante et que nous devons trouver de nouvelles missions à nos facteurs et faire monter en charge les activités nouvelles au sein du groupe”. Une montée en charge très progressive puisque suivant la stratégie Ambition 2020 mise en place par La Poste, dans 4 ans, les nouveaux services devraient représenter environ 5 % du chiffre d’affaires du groupe.

Relais administratifs

“Recycler” les facteurs n’est pas une nouveauté. Fin 2014, Thierry Mandon, alors secrétaire d’État à la réforme de l’État et à la simplification, souhaitait, sur Sud Radio, en faire des “médiateurs administratifs”.

Dans le principe, il s’agit donc de s’appuyer sur le réseau des bureaux de Poste pour créer des lieux d’accueil et de conseil pour les démarches administratives basiques. Les facteurs pourraient même apporter ce service à domicile pour les personnes ne pouvant pas se déplacer. Le ministre souhaitait “élargir” les missions des agents de La Poste, “sans en faire des agents de la Sécu ou de la Caf”, et ce “s’ils en sont d’accord“. Thierry Mandon décrivait alors l’organisation de La Poste comme “gravement menacée à moyen terme”, en raison d’un chiffre d’affaires “en baisse de 7 % par mois tous les mois”. À l ‘époque, le ministre se montrait très clair : soit les agents acceptaient une évolution de leur métier, soit ils se résignaient à “un gigantesque plan social dans dix, quinze ou vingt ans”.

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