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Nouveau stade de rugby : ce projet privé qui pourrait coûter cher aux finances publiques

Vue intérieure du futur grand stade de rugby ©FFR / grandstaderugby.fr

La Cour des Comptes a adressé un courrier au ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports quant au projet de la Fédération française de rugby de construire un stade de 82 000 places en région parisienne. Une initiative privée mais qui coûterait, au minimum, près de 160 millions d’euros à l’Etat.

“Une charge supplémentaire annuelle minimale de l’ordre de 23 millions d’euros pour l’Etat.” Dans une lettre adressée au ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, Patrick Kanner, Didier Migaud, président de la Cour des comptes, revient sur le projet de construction d’un stade de 82 000 places dédié au rugby, à horizon 2021.

Prévue pour être installée à Ris-Orangis, dans l’Essonne, cette nouvelle enceinte, dont le coût est estimé à 600 millions d’euros, devrait faire de l’ombre au Stade de France. Ce projet, porté par la Fédération française de rugby, repose “à 90 % sur un appel de fonds extérieur”. La FFR prévoit un recours à l’emprunt d’au moins 400 millions d’euros, qui pourrait être garanti par le département de l’Essonne.

“L’Etat ne peut ignorer un risque pour les finances de la collectivité locale qui apporterait sa garantie”, estime Didier Migaud dans ce courrier. Mais c’est bien dans les caisses de l’Etat, qui n’apporte pourtant aucune subvention, que ce projet pourrait faire des dégâts.

Le nombre de manifestations non-sportives au Stade de France “divisé par deux”

La concession actuelle du Stade de France à un consortium court jusqu’en 2025 et comprend la tenue de compétitions organisées par la FFR. Pour les Sages de la rue Cambon, “le retrait des manifestations de rugby du programme du Stade de France entraînerait pour l’Etat de lourdes conséquences financières”.

Au total, entre 161 millions et 186 millions d’euros, suivant la date d’entrée en fonctionnement du nouveau stade de rugby. Une somme qui correspond aux 6,3 millions d’euros annuels qui devront être versés au consortium pour la non-tenue des manifestations réservées, mais aussi 17 millions d’euros par an d’indemnité d’absence de club résident, jusque-là suspendue par l’activité amenée par la Fédération française de rugby, mais dont l’Etat devrait à nouveau s’acquitter si la situation évolue.

Autrement dit, un projet financièrement risqué pour le département de l’Essonne et coûteux pour l’Etat. Un lourd bilan comptable auquel s’ajoute “l’avenir précaire du Stade de France, propriété de l’Etat, en cas de création d’un stade concurrent”. Le nombre de manifestations non-sportives organisées au Stade de France pourraient ainsi être “divisé par deux, avec des tarifs diminués”.

“Rechercher des alternatives au projet de stade”

Autant de raisons qui amène la Cour des comptes à presser le ministre d’envisager des alternatives à la construction de cette nouvelle enceinte. Les Sages citent ainsi la possibilité de vendre le Stade de France à la FFR, avançant le chiffre de 400 millions d’euros, de reporter la construction du nouveau stade, ou encore de renégocier un nouveau régime de concession, voire de rechercher un nouvel exploitant pour le Stade de France qui serait enclin à le rénover.

Des pistes qui n’ont pas été explorées par les pouvoirs publics, relève la Cour des comptes, pour qui la question de la création du stade est encore ouverte jusqu’en 2017 et qui préconise de “mettre, en tout état de cause, à profit la période restant jusqu’en 2017 pour rechercher, avec la FFR, des alternatives au projet de stade de rugby”.

Des recommandations balayées, semble-t-il, par l’Etat, qui a répondu par un courrier signé de Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, et de Thierry Braillard, secrétaire d’Etat aux sports, pour qui “le projet de stade de la FFR (…) est encouragé par l’Etat”, faisant valoir que le modèle économique du Stade de France est “déjà fragilisé en raison des nombreux contentieux qui opposent les différentes parties à ce contrat, indépendamment du projet de stade de la FFR”. Sauf que, comme le rappelle Didier Migaud, “760 millions de dépenses publiques ont été engagées depuis 1998” pour le Stade de France…

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